Mon épouse est russe. « Lis Les âmes mortes une fois dans ta vie, me conseille-t-elle. C’est drôle, délirant, touchant ; ça sonne si vrai. » L’occasion se présente lors de la sortie d’une nouvelle traduction en français du cultissime roman de Nikolaï Gogol. Un magnifique ouvrage accompagné d’une centaine d’eaux-fortes réalisées par Chagall en 1924. Edition reliée, couverture cartonnée, papier agréable, publiée au Cherche Midi.

Je commence la lecture dans notre nouvel appartement. Nous venons de nous installer à la montagne. Au bout de trois soirs, je découvre un problème. L’édition est mal fichue. L’imprimeur (ou le relieur? ) a mis deux fois le même cahier ! Une fois à l’endroit une fois à l’envers. Incroyable ! Jamais vu un truc pareil.

Que faire ? Le libraire qui m’a vendu cet exemplaire n’y est pour rien. Il faudrait que je me tourne vers l’éditeur. Mais je renonce à écrire un message, attendre une réponse et commencer à me battre pour 22 euros (j’ai acheté le bouquin lors d’un déplacement à Evian). Tant pis. Je commande un autre exemplaire. C’est l’époque où, pour tuer la concurrence, Amazon offre les frais de transport, même pour la Suisse. Que faire de mon ancien exemplaire ? Je ne peux pas jeter un livre à la poubelle. Exclu. Et en 2008, les boîtes à livres ne sont pas si répandues. Je pourrais peut-être « l’oublier » sur un banc public, avec un Post-it collé dessus : « Cet exemplaire est à vous. »

A ce moment, pour nous insérer dans la vie socioculturelle de notre village, mon épouse nous inscrit à la grande braderie. Chaque participant étale les objets qu’il souhaite vendre sur une petite table.

Le jour convenu, je me rends dans la salle de gym pour disposer quelques bibelots, une lampe et une dizaine de livres dont je n’ai plus usage. Parmi eux, Les âmes mortes en version incomplète. Je vends le bouquin sans difficulté à une dame qui semble grande lectrice. Comme un petit filou, je me garde bien de lui signaler le problème. Tant pis pour elle : elle vivra ce que j’ai vécu.

Le week-end suivant, un voisin belge nous invite, mon épouse et moi, à une soirée frites-moules au Buffet de la Gare. Au nom de l’intégration socioculturelle dans notre village de montagne, nous nous y rendons. Le copain belge a invité deux autres personnes. Parmi elles... la dame à qui j’ai vendu Les âmes mortes. Elle s’appelle Monique. Enchanté.

Une goutte de sueur me dégouline dans le dos. On parle du prix des chalets, des balades à faire dans la région, d’une boutique qui vient d’ouvrir. Moi, je n’ai que Les âmes mortes à l’esprit. Monique a-t-elle commencé la lecture ? Est-elle arrivée au cahier inversé ? Sait-elle que je l’ai arnaquée ? Je me hais. Comment ai-je pu vendre ce livre dans mon propre village ? !

Au moment du café, Monique pose les mains sur la table et m’apostrophe :

- Dites Eugène, le livre de Gogol que vous m’avez vendu, il a un problème.

- Ah bon ?
Ma réaction est consternante. Est-ce que je compte vraiment m’en tirer en faisant semblant de n’être au courant de rien ?

- Il manque des pages. C’est bizarre.
- Ah bon ?

Tout le monde écoute. Tout le monde veut savoir quel type de vendeur bizarre je suis. Monique décrit sa surprise. Son agacement. Mon épouse – parfaitement au courant du problème et qui m’avait déconseillé de vendre mon exemplaire à la braderie – me dévisage en pouffant de rire. Je me lance dans une explication pitoyable. Et je finis pas [sic] déclarer que je lui offre un exemplaire neuf en guise de dédommagement.

Deux jours plus tard, devant la boulangerie, j’offre mon exemplaire acheté sur Amazon tandis que Monique me rend mon exemplaire pourri. Depuis ce jour, Les âmes mortes amputées d’un cahier dorment dans ma bibliothèque.

Ce texte d'Eugène a été publié le 10 février 2023 dans La Région.

NOUS SUIVRE

Fermeture de l'Ascension

La bibliothèque sera fermée pendant le weekend de l'Ascension.

Fermeture le mercredi 8 mai à 17h00.

Réouverture le mardi 14 mai à 10h00.

La boîte de retours sera aussi fermée durant cette période.

Nous vous souhaitons un excellent week-end !

HORAIRES
Lundi : fermé
Mardi : 15h00 - 18h00
Mercredi :14h00 - 18h00
Jeudi : 15h00 - 19h00
Vendredi : 15h00 - 18h00
Samedi : 10h00 - 17h00

Les salles d'étude du 2ème étage
sont fermées jusqu'à nouvel avis.
Des places de travail sont disponibles
au 1er étage en salle de travail
et sur la galerie entre le rez-de-chaussée
et le 1er étage.

Lundi : fermé
Mardi : 15h00 - 18h00
Mercredi :14h00 - 18h00
Jeudi : 15h00 - 19h00
Vendredi : 15h00 - 18h00
Samedi : 10h00 - 17h00
Lundi : fermé
Mardi : 10h00 - 20h00
Mercredi :14h00 - 20h00
Jeudi : 14h00 - 20h00
Vendredi : 14h00 - 20h00
Samedi : 10h00 - 17h00

Prêt :

Lundi : fermé
Mardi : 10h00 - 18h00
Mercredi :14h00 - 18h00
Jeudi : 14h00 - 19h00
Vendredi : 14h00 - 18h00
Samedi : 10h00 - 17h00

Café – PC et photocopieuse – Places de travail – Mini-cinéma :

Lundi : fermé
Mardi : 10h00 - 20h00
Mercredi : 14h00 - 20h00
Jeudi : 14h00 - 20h00
Vendredi : 14h00 - 20h00
Samedi : 10h00 - 17h00

Les ordinateurs et l'imprimante-photocopieuse sont éteints 10 minutes avant la fermeture.

NOUS CONTACTER