Aujourd’hui, nous poussons les portes des pénitenciers du 18e siècle avec un ouvrage de l’Anglais John Howard : Etat des prisons, des hôpitaux et des maisons de force, publié en français en 1788. En 1755, Howard est fait prisonnier politique. Il découvre alors avec horreur les conditions de détention de son époque. Une fois libre, il se fait un devoir de sensibiliser la population aux mauvais traitements réservés aux personnes détenues et se rend dans des centaines de prisons en Grande Bretagne et sur le continent européen pour être témoin de leurs pratiques. Ce qu’il y observe le consterne : malnutrition, hygiène déplorable, maladies… Les captifs dépérissent à vue d’œil. Les voyages de Howard le mènent jusqu’en Suisse, où il visite les prisons de plusieurs villes, dont Genève, Berne ou Lausanne. La description qu’il donne des geôles de notre pays est bien moins sombre que ce qu’il a pu constater en Angleterre. Ce sont en général des lieux où on apporte une grande attention à la propreté des locaux et à la santé des condamnés. Ces derniers sont souvent convenablement nourris et se voient confier des travaux, ce qu’ils apprécient fortement. C’est le cas à Berne où les malfaiteurs ont la tâche de nettoyer et déneiger les rues. Cette main d’œuvre gratuite en fait d’ailleurs une des villes les plus propres d’Europe. Howard remarque que la plupart des prisons qu’il visite en Suisse sont vides ou très peu peuplées, ce qu’il explique en grande partie par une éducation axée sur la religion et la morale, même pour les enfants les plus pauvres.
Et qu’en est-il du malheureux personnage revêtu d’un tonneau qu’on observe sur la gravure extraite du livre de John Howard? Ce criminel danois est promené dans les rues, affublé d’un « manteau espagnol », une sorte de cuve dans laquelle il est enfermé par des fers. Ce châtiment honteux était, semble-t-il, si redouté qu’il réduisit quasiment à néant le nombre de cambriolages nocturnes à Copenhague.